Lagrand

                Lagrand est mon deuxième chez moi (parmi d’autres encore !).
            En effet, si je suis née à Lachau, y ai appris à marcher et à parler, je n’y suis pas allée à l’école (contrairement à mes frères). J’ai commencé ma scolarité à Lagrand. Et puisque je parle de l’école, je voudrais dire ici merci à mes deux institutrices : Mme Bonnaud et Mme Coussy. J’y reviendrai dans un article sur l’Ecole Communale de Lagrand.
               Lagrand est un village perché en haut d’une colline, au bord d’un plateau à une altitude allant de 581m à 1619m, population environ 266 habitants. On y accède par deux routes aussi raides l’une que l’autre mais la principale est un peu plus large (moins étroite) que l’autre et a deux beaux virages en épingles à cheveux. Elle passe devant les Pins de Baron. Une petite sapinière (pourquoi disait-on pins ?) qui appartenait non pas à un baron mais à M. Baron (je ne sais pas qui en est propriétaire actuellement). Ce M. Baron a longtemps habité "le château" qui était en fait une maison bourgeoise. Cette bâtisse est la mairie de Lagrand depuis de nombreuses années.

             Quand ma famille est arrivée à Lagrand en 1955, il n’y avait pas de tout-à-l’égout, pas d’eau courante, pas de rues goudronnées…
            Pour l’eau, il fallait aller la chercher à la fontaine (il y en avait une à proximité de la maison que nous habitions). Mais l’hiver, quand les températures descendent largement en dessous de 0, avant de pouvoir remplir son seau d’eau, allumer du feu sous le robinet était indispensable ! Pendant l’été, on se rendait à une autre fontaine avec les pots-à-eau, celle de la calade à côté du lavoir, un peu plus éloignée, mais son eau était particulièrement légère et fraîche (très agréable en des temps où la majorité des gens n’avaient pas de réfrigérateur). Quelques années plus tard, de gros travaux ont été entrepris par la commune : toutes les maisons ont eu l’eau à l’intérieur après le creusement des rues – à la main -, la pose de tuyaux, la remise en place… Évidement, il n’y a pas eu de belles cuisines, salles de bains, toilettes, installées tout de suite, presque personne en avait les moyens !
            En suite, il y a eu le goudronnage de la route, de la place. Quant aux ruelles, elles ont été empierrées. Ce dernier travail a été effectué par des groupes de jeunes venant de divers pays d’Europe, logés et nourris par les habitants du village. Ces travaux-là m’ont laissé un excellent souvenir : l’odeur du goudron, les machines qui dament le sol, les pelleteuses. Voir des lieux se transformer ainsi m’avait paru très impressionnant (je suis toujours admirative des grands travaux routiers !). Quant à la présence de ces jeunes (vieux pour moi qui avais 7 ou 8 ans), elle a été marquante aussi : nous entendions pour la première fois des langues inconnues. Les jeunes filles hébergées chez nous étaient Bulgares je crois.

            Chose étonnante pour un village ancien, il n’y avait aucun commerce : pas de boulangerie, ni d’épicerie, de boucherie. En ces années-là, des marchands passaient une ou deux fois par semaine avec un fourgon : 2 épiciers, 1 boulanger, 1 boucher-charcutier, 1 poissonnier et une fois par mois un marchand de vêtements ; une fois par an, des rempailleurs de chaises ; de temps en temps des cardeurs qui refaisaient les matelas ; également un rémouleur. Il est vrai qu’une boulangerie, une épicerie, un bar, un bazar étaient ouverts à Pont-Lagrand, à 1 km en bas du village (mais à pieds, avec la côte et un regard d’enfant, ça paraissait loin !)
            L’église rassemblait quasiment tout le monde le dimanche, ceux qui y entraient et ceux qui restaient devant… Je reviendrai aussi sur cette petite église du XIIe siècle, sobre, à l’excellente acoustique.
            Ne croyez pas que la vie était triste. Elle était sûrement dure pour les parents qui avaient beaucoup de mal à « joindre les deux bouts » mais je croix que nous y avons tous de bons souvenirs ! Comment les enfants préparaient leur confession, les disputes entre groupes d’enfants qui se formaient et se modifiaient, les « raids » dans les cerisiers au printemps, les voisines qui chantaient dans la rue, la foire annuelle, jouer au « portrait » dans la neige, le nougat que le mari de l’institutrice préparait pour Noël, la salle de la mairie où tout le monde assistait au dépouillement de chaque élection etc, etc
            Tant d’anecdotes ! J’essaierai d’en rapporter quelques unes.

Peu de choses sur internet concernant Lagrand mais ce site est bien fait et y consacre une page :

Provence. Web
https://www.provenceweb.fr/f/hautalpe/lagrand/lagrand.htm


L'école

           C'est à lagrand que j'ai commencé d'aller à l'école. Une classe avec un grand tableau vert (ou noir ?), des bureaux en pente avec le banc fixé à la table, le trou pour l'encrier... Cartes de géographie et cartes du corps humain aux murs ; et le poêle.. un grand poële gris entouré d'une rambarde à barreaux (en hiver, ce n'était pas du luxe ! non seulement pour le chauffage mais aussi parce que les enfants venant des fermes -par tous les temps- y faisaient réchauffer leur repas). Une classe d'une trentaine d'enfants de 6 à 14 ans. Et oui ! Les instits d'alors enseignaient ainsi ; on ne parlait pas de fermer une école ou une classe parce que dans une classe double il manque 1 enfant par rapport au quota fixé par on ne sait quel bureaucrate affalé sur sa chaise et devant son écran). Du CP au certificat d'étude (pour ceux qui n'allaient pas au collège). J'ai un excellent souvenir de cela car, quand je trouvais que ça commençait à patiner dans mon cours et que je m'ennuyais, je pouvais m'intéresser à ce que faisaient les autres. Excellent souvenir des séances de calcul mental que faisaient tous ceux qui savaient compter. Les derniers jours de juin où l'institutrice nous faisait écouter Pierre et le loup (tout le monde était scotché).

          Je croyais avoir beaucoup oublié mais au fur et à mesure que j'écris tant de souvenirs reviennent !
          On apprenait non seulement à chanter la Marseilaise mais aussi le Chant des Partisans et bien d’autres chants évidemment ! Chanter “en canon”  Frère Jacques, S’appliquer pour Mon beau sapin…
          Il avait fallu élever des vers à soie afin observer la fabrication des cocons, les nourrir avec des feuilles de mûrier (qu'on allait ramasser à l'entrée du village où il y avait 3 grands arbres : 2 mûriers blancs et un noir, ceux-là même dans les quels je passais des heures à observer les fleurs, feuilles et fruits (manger aussi ces grosses mûres !), surveiller les chenilles, les insectes, écouter les oiseaux, regarder le paysage...).
           Ramasser des feuilles qu'on devait taper avec une brosse en chiendent pour ne laisser que les nervures pour étudier la structure…
          Le nougat que fabriquait à Noël le mari de l'institutrice, Mme Bonnaud, le chocolat chaud qu'elle préparait elle-même pour les élèves avant les vacances de Noël.
         Tous ces objets qu'on trouvait si beaux qu'on confectionnait pour la fête des mères (j'ai toujours une bergère en plâtre de Paris, peinte à la gouache et vernie)...

           Les jeux des récréations : la guerre (donc j'ai oublié la règle : on traçait un cercle au sol, on le divisai en quartiers et je suppose qu'on devait prendre la place les uns des autres), la règle où, pieds contres pieds joints, se tenant par les mains, on tournait le plus vite possible penchées en arrière (jeu pratiqué par les filles), les billes bien sûr : le trou ou le triangle ; le portrait en hiver qui consistait à se laisser tomber dans la neige de tout son long et se relever sans abimer l'empreinte ainsi laissée. Et bien d'autres.
             L'école telle qu'elle était n'existe plus : elle a été transformée en auberge et le bâtiment a été modifié. Le corps du bâtiment était composé d'un hall d'entrée avec à gauche la porte de la classe et en face vers la gauche celle qui menait à l'appartement de l'institutrice et sa famille. A l'extérieur, sur la gauche, les wc (2 je crois), WC “à la turque” aux portes de bois, un petit préau sur la droite. Le tout entouré d'un mur bas et d’un grillage haut. Cette école a été construite en 1890, désaffectée en... 1985. Une autre école a été construite à Pont-Lagrand (en-bas du village) en 1982. (c'était l'école maternelle, en suite les enfants allaient à l'école primaire d'Eyguians à 1,5 km de là).
             Je profite de ce petit texte pour rendre hommage à mes deux institutrices : Mme Bonnaud et Mme Coussy ! Elles ont eu beaucoup de persévérance, de courage, d'amour de l'enseignement aussi, pour faire avancer des enfants de tous âges en même temps, avec chacun ses particularités. Merci à elles. 


L'église Notre Dame de la Nativité

            L’église de Lagrand… Elle est très belle et évoque tant de souvenirs ! La communion privée, la confirmation, la communion solennelle, les confessions où l’on s’amusait beaucoup à préparer ce qu’on allait dire au curé (puisque bien sûr les enfants n’ont pas la notion du péché, on la leur inculque…) Les mariages où des dragées étaient lancées à la volée et tous les enfants du village venaient en ramasser (personne ne pensait alors que par terre c’était sale !). Les messes où quasiment tout le monde allait, certains par foi, beaucoup par convenance et d’autres parce qu’on allait à l’église pour une sortie dominicale où l’on se tenait bien, bien habillé. Et les commères !

        Tous les enfants allaient au catéchisme enseigné par un curé dans une salle de la cure, on y allait comme allait à l’école sans se poser trop de questions : certains pensaient que dieu existe et d’autre pas… Le curée nous passait aussi des films (Saint Vincent de Paul et autres) et enfants bien sages, quand le curé devait monter sur un banc pour brancher le cable du projecteur à la douille de l’ampoule, il y en avait deux ou trois pour se regrouper à l’autre bout du banc…
        Beaucoup plus tard y ont été donnés en l’église des concerts, chorales ou petits groupes. Toujours du monde pour y assister.
        C’est une église dont la construction a commencé à la fin XIIe siècle, art roman aux influences lombardes et qui fut achevée au XIIIe en style ogival. Elle a été construite un peu comme une forteresse avec ses murs très épais et soutenus dont les pierres viennent des carrières d’Eguyans, village voisin. Elles sont de calcaire noir et, si elles ont bien résisté au temps, l’église a plus ou moins souffert des guerres de religions. Préexistait un prieuré de bénédictins dès le XIe siècle. On peut en voir encore quelques vestiges.
        Quand, à de rares occasions, je retourne à Lagrand, j’aime bien aller y faire un tour.

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lLs Pins de Baron

en cours de préparation


Mardi Gras

              Pour Mardi Gras, la plupart des enfants se déguisaient. Nul besoin d’aller dans des magasins pour acheter divers accessoires ou costumes (ces magasins n’existaient pas et les parents n’auraient pas eu les moyens de dépenser de l’argent à des choses). Mais les déguisements ne manquaient pas d’originalité ! Bien au contraire, ils faisaient appel à la récupération, la réutilisation de divers vêtements et objets utilisés couramment ou relégués au grenier. De l’imagination

Si, passant par ici, vous pensez être sur cette photo, cliquez dessus pour l'agrandir ! Et un message me ferait plaisir !
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         Quand tous étaient prêts, c’était le passage dans les maisons, panier au bras. Pas d’argent, rarement des bonbons mais qui donnait un paquet de farine, qui des œufs, un autre du sucre, du lait, des biscuits parfois. Et les gens devaient identifier les enfants… (je suppose que beaucoup devaient y retrouver leur vêtements ou accessoires prêtés à l’un ou l’autre des enfants !).
           Puis, nous allions à la cure (le curé prêtait la salle de catéchisme qui était chauffée) (ou d’autre fois chez tel ou tel parent). Des grands ou des adultes préparaient les crêpes et l’après-midi se terminait joyeusement !
            Je raconte ceci parce que, ce sont de bons souvenirs et la marchandisation de tout évènement me contrarie ; comme si on ne pouvait s’amuser, faire une fête qu’en passant par la case monnaie, monnaie. Avant ces excès de la vente presque forcée on ne parlait pas beaucoup de solidarité mais elle était là. Maintenant, c’est le contraire…


"Allons aux marmites !"

Photo "Etant tout gamin on jouait a..." (France) par jmpastore sur vacanceo.com qui m’a autorisée à utiliser cette photo car je n’en ai pas et ne peux en prendre actuellement.
Photo "Etant tout gamin on jouait a..." (France) par jmpastore sur vacanceo.com qui m’a autorisée à utiliser cette photo car je n’en ai pas et ne peux en prendre actuellement.

         Voilà un jeu qui m’a marquée !
         On va aux marmites ?
        Et on allait aux marmites. C’était surtout avec Jacqueline mais avec quelques autres enfants parfois. On passait ainsi des heures à jouer… dans les buis. Ils n’étaient pas taillés et poussaient très bien tout seuls, ça ne les empêchait pas d’être très beaux. On se faufilait aux pieds des arbustes (il y avait toujours des creux formant comme de petites niches) et là, on ramassait par terre ou on cueillait sur les branches les fameuses marmites (capsules). Puis, on jouait avec comme si c’était des ustensiles de cuisine et même de la vaisselle… des "taraillettes" (comme on dit dans le midi).
        Les marmites sont donc le fruit du buis, nous les appelions “marmite” mais je ne sais pas si c’est courant ! je ne crois pas avoir entendu ailleurs cette appellation pour ce fruit (auquel personne ne s’intéresse beaucoup semble-t-il). Si nous en “faisions” des marmites, c’est parce que cette baie est plutôt ronde, a 3 petites excroissances sur leur sommet et il reste un morceau de la tige qui la rattachait à la branche, formant ainsi trépied et bouton de couvercle.
         Maintenant, je me demande comment nous arrivions à improviser autant autour de cette baie si anodine ! Mais le fait était là, nous passions des heures dans les buis et j’ai un souvenir merveilleux de ces moments tous verts !
         Après quelques recherches sur internet, je constate qu'en botanique on compare le fruit du buis à une marmite (quand l’imagination des enfants et celle des savants se rejoignent !) et que les feuilles et fruits de l'arbuste ont des vertus médicinales..
         Les branches du buis étaient utilisées pour la fête des Rameaux, ceux que les gens glissaient derrière le crucifix de la maison où ils restaient jusqu’à l’année suivante après avoir été bénis lors d’une messe à l’église.


Partageons nos péchers

        L’église de Lagrand est certes une belle église du XIe siècle mais c’est surtout celle où presque tout le village allait (croyants ou pas) ; lieu de rassemblement, de solidarité pour les enterrements, de rires pendant les mariages, les baptêmes, les communions et de cancans les autres dimanches…
          Mon souvenir impérissable de cette partie de mon enfance reste la confession. Pour les grandes fêtes comme Pâques, Noël, l’Assomption et plusieurs autres mais aussi quelques dimanches dans l’année, nous devions communier donc préalablement nous confesser. Mais, quels péchés pour des enfants de 7 à 11 ans qui ont la conscience tranquille ? Alors, la solution adoptée était simple : nous avions choisi quelques péchés véniels (tels le mensonge, la désobéissance, l'envie, l'oisiveté, pour des situations évidemment insignifiantes) et nous en disions un ou deux chacun au curé… Et ne me dites pas que nous mentions alors, nous ne nous sentions coupables de rien ! Nous n’avions pas vraiment à mentir (parfois un peu aux parents pour justifier un retard de retour à la maison), rien à dérober (personne n’était riche et il n’y avait pas de médias omniprésents pour nous inciter à baver devant tel ou tel jouet), pas d’oisiveté car nous ne nous ennuyions pas (toujours quelque chose à faire dehors !)
           Tout le monde était content : nous avions quelques péchés à avouer au curé et le curé quelques absolutions à donner… Mais je pense qu’il n’était pas dupe !
         Et je ne résiste pas au plaisir d’un autre petit souvenir d’église : le fils d’une famille de Lagrand faisait sa communion solennelle comme d’autres enfants ce jour-là mais sa mère restée à la maison (afin de préparer le repas de ce jour de fête) s’aperçut que son fils avait oublié son livre de messe. Il n’était pas encore loin et elle l’a interpelé dans la rue “Non de dieu, Albert, tu as oublié ton livre de messe” !!!!!


Les mains noires aux cerises

          Ceci est une petite histoire dont j’ai peut-être seule le souvenir… à moins que la personne avec qui je l’ai partagé s’en souvienne aussi (si elle est toujours en vie)…

           Quand c’est arrivé, j’avais 6 ou 7 ans, je ne me doutais pas alors que ce petit épisode de ma vie resterait dans ma mémoire pour toujours et influencerait sûrement mes idées et convictions.
            Je revenais de la fontaine (celle où, l’été, quasiment tout le monde  allait chercher de l’eau bien fraîche (car la majorité des gens n’avait pas de réfrigérateur…) et j’atteignais le haut du raidillon quand une voix que je ne connaissais pas me salua en me tendant une poignée de cerises… la main était caramel et chocolat ; quand je levais vraiment les yeux vers la tête qui la commandait, quelle ne fut pas ma surprise ! Un sourire discret sur un visage à la peau très, très brune, des cheveux noirs très, très frisés. Devant mon étonnement, il me dit ‘tu es M., tu es la fille de M. et Mme B» « Oui Monsieur ». Il ne ressemblait à personne que j'avais vu jusque là et en plus il savait qui j’étais, mon prénom, le nom de mes parents... ! Je lui ai souri aussi, j’ai accepté les cerises et suis rentrée à la maison.
             Pour la première fois de ma courte vie, je venais de voir un noir. (et ne me dites pas que le terme est raciste car c’est simplement ce que j’ai vu, d’où il venait, je ne le savais pas, j’avais vu quelques dessins dans le livre de géographie représentant les types d’habitants de la terre mais bien sûr, aucun rapport avec la réalité ! (le colonialisme n’était pas loin !)).
            Mes parents m’ont appris que cet homme était le compagnon d’une femme ayant de la famille à Lagrand, qu’ils n’habitaient pas ici, venaient seulement de temps en temps mais connaissaient tout le monde (le village ne comptait que deux ou trois cents habitants).
             Voilà ce qui fut ma première rencontre du « 3ième type » : superbe ! de quoi marquer joliment une vie, non ?


Allons au fleurs

          A chaque printemps, quasiment tous les enfants « allaient aux fleurs ». C’est-à-dire que nous allions cueillir des fleurs de saison là où elles poussaient.
           Les violettes dans les creux de talus ainsi que les primevères qui les accompagnaient de près. Les hépatiques qui ont besoin d’un peu plus d’espace. Le muguet et le sceau-de-salomon poussant de préférence aux pieds des arbustes (comme les noisetiers) Les tulipes, les narcisses dans les prés ainsi que les boutons d’or. Les bleuets et coquelicots en plein champs, en bordure des prés, mélangés avec les fleurs de moutarde en une magnifique explosion de couleurs !Les pervenches grimpant sur l’un des murs du jardin du curé ou s’agrippant au talus en bord de Blésance. (c’est avec leurs lianes fleuries que nous nous déguisions en printemps bleus, recouverts tant bien que mal de la tête aux pieds…). Les oeillets sauvages d’un si beau rose et tellement parfumés poussant autour du “trou de la bombe”.
           Nous partions à 2 ou 3 et même 5 ou 6. Je peux dire que nous savions cueillir les fleurs car nous ne les arrachions pas (sauf si la mère de l’un d’entre nous en voulait pour son jardin ou pour mettre en pot). Il y avait tellement de fleurs que nous faisions tant de bouquets ! Au retour, nous en donnions aussi aux personnes âgées et seules (non, non, nous n’étions pas des anges ! mais pour les fleurs, il fallait bien que tout le monde en profite un peu !)
           Quand nous allions aux narcisses, c’était la razzia ! car, sil les fleurs sont belles en bouquets, elles sont bonnes sur la langue. En effet, on coupe la fleur en deux et on aspire la goutte de suc qui se trouve dans le calice…  parfum subtil et sucré. Voilà un bien fin plaisir volé aux abeilles et difficile à retrouver !
           Nos bouquets de violettes et primevères étaient généralement bien ronds, mauve au milieu, jaune sur le pourtour… Les narcisses, comme des gerbes de blé ; les bleuets, coquelicots, marguerites, boutons d’or (ceux-là, nous les cueillions peu car ils ne tiennent pas bien une fois coupés) en touffe bariolée ; les muguets bien serrés les uns contre les autres, protég és par leurs longues feuilles.
          Il y avait bien évidement les fleurs spéciales, celles dont on ne dit les lieux qu’en confidence,  telles ces violettes rouges aux pétales presque grenat qu’on ne trouvait qu’en bas des pins de Baron (mais je ne vous dirai pas où… d’autant qu’avec les travaux qui transforment tout, elles ont sûrement disparu depuis de nombreuses années…). Le sceau-de-salomon ne foisonnait pas non plus ! Il venait surtout dans quelques creux en bas de la Roche. Les violettes blanches (en réalité d’un mauve très pâle) poussaient plus tôt en bas du village…
             Ces souvenirs de fleurs sont parmi mes meilleurs souvenirs d’enfance.


Le jardin du curé

         Le jardin du curé est un endroit où les enfants adoraient aller jouer. On y accédait généralement en escaladant un mur qui nous paraissait très haut. Il était en pierres, c’était donc aisé de caler les pieds dans des interstices… Pour compliquer la chose, souvent nous escaladions d’abord le mur qui longeait la route, arrivé sur un étroit sentier, nous étions au pied du mur du jardin du curé. (il nous paraissait très haut et pourtant, quand je suis retournée à Lagrand il y a peu, j’ai eu une surprise : il ne mesure pas plus d’1m80…)
          Ce jardin de curé ne dérogeait pas à la règle : il avait beaucoup de charme, était fleuri et entretenu tout en ayant l’air sauvage. Sur la droite des rosiers rose pâle dont les fleurs aux pétales froissés sentaient merveilleusement bon. Au milieu, un escalier qui menait à un petit chemin pour atteindre la cure et la rue de l’autre côté (c’est comme ça dans les villages bâtis en côte !). Sur la droite, des pervenches et du lierre sur tout le mur.

         Un des jeux consistait à monter les escaliers en courant de plus en plus vite si possible et de sauter par le mur de lierre et de pervenches… Ca se bousculait pas mal et les chutes étaient amorties par les feuillages.
        Dés le printemps, un autre jeu consistait à s’habiller de pervenches et de lierre. On se recouvrait de lianes ! De la verdure et des fleurs bleutées… pour simuler capes et robes.
         Si nous coupions des pervenches et du lierre pour nous déguiser, nous ne cueillions pas les roses, iris et autres fleurs du jardin. Pour le laisser tel quel sûrement. Pour ne pas nous faire gronder peut-être ?
         Les buis sont nombreux à Lagrand et il en pousse aussi dans le jardin du curé. Avant le catéchisme, il arrivait que nous allions au jardin prendre des boules de buis pour les lancer sur le curé… Pardon abbé Richaud ! Bien sûr, il nous grondait (mais on faisait ça rarement quand même !).
           Je n’ai pas revu le jardin car… je n’ai pas osé escalader le mur !
           La prochaine fois, il faudra que je le fasse… peut-être….
           Mais le chemin qui y conduit est toujours bien fleuri : iris, lilas


Annuaire illustré 1922

         Comme  pour  Eourres,  voici  quelques informations à  propos de Lagrand tirées d'un annuaire téléphonique datant de 1922 :

 

Curé : M. BERMOND
Instituteur : M. MOINE

 

Maire : M. BARNIAUDY Auguste
Conseillers municipaux :
- M. RICHAUD Rémy
- M. TAIX Alexandre,
- M. BARNIAUDY Ferdinand
- M. ESTELLON Achille
- M. SALLA Daniel
- M. DEPEYRE Joachim
- M. PONTIS Henri

 

Commerces :
Bicyclettes : M. SEGUIN L.
Boulangerie : M. BARNIAUDY G.
Epiceries : M. ACHARD L. M. BARNIAUDY A
Forain : M. ACHARD L
Grains et farines : M. ACHARD L M. BARNIAUDY A
Meuniers : M. PAYAN Louis ROUGIER G
Scierie : RICHAUD R
Sériculteurs : MARTIN A TAIX Albert
Tabac : ACHARD L
Cercle "L'Union Fraternelle" : M. BARNAUDY A (gérant)