Vers Mazar-I-Sharif

        C’est au cours du séjour de 1973 que nous sommes allés à Mazar-i-Sharif, en novembre.
        Au départ de Kaboul, le temps était froid mais beau, la route goudronnée serpentait dans de beaux paysages sans verdure et à la végétation endormie par l’hiver… Puis la neige est apparue aux alentours puis s’est mise à tomber… Et c’est à ce moment-là, arrivés juste avant le tunnel de Salang qu’un caillou, projeté par les roues d’un camion qui nous précédait a cassé le pare-brise ! Il n’a pas volé en éclats mais est devenu quasiment blanc de fissures ! (ce n’était pas encore du verre feuilleté). Donc, demi tour, la tête dépassant de la portière, retour vers Kaboul. Nous n’avons pas fait tomber le pare-brise car il neigeait, une vitre latérale ouverte était moins gênante... Ce retour a été particulier non seulement à cause du pare-brise cassé et de la vitre ouverte mais à cause de la neige qui tombait, du froid et de la nuit qui arrivait tôt. Nous avons retrouvé l’hôtel que nous avions quitté et là, on nous a indiqué un endroit où le pare-brise pourrait être changé (les Afghans prenaient notre AMI6 pour une voiture russe et pensaient que ce serait facile d’en trouver un...) Il a pu être changé en effet mais par une plaque de plexiglas coupée à la bonne dimension. Il a fait tout le voyage et même plus après notre retour en France. L’inconvénient du plexiglas est que cette matière jaunit au soleil et est rayée par les essuie-glace (heureusement il a peu plu !).
         Rebelote pour la route de Mazar… Le tunnel est étroit.
        Ce tunnel a été percé dans les années 60 par l’Institut Soviétique de l’Exportation et le Ministère Afghan des Travaux Publics. Les travaux ont duré 3 ans. Il a été inauguré en 1964. Sa percée était importante pour les déplacements entre le nord et le sud pour un itinéraire qui passe par des routes à plus de 3000 m d’altitude et de nombreux lacets. Le tunnel, de près de 3 km, est complété par 5 km de pare-avalanches (qui ne semblaient pas superflus !). Malheureusement, il a été très endommagé par les guerres récentes mais est aujourd’hui réhabilité.
         Après les grandes montagnes escarpées, ce sont les steppes, les hauts plateaux avec leur climat froid et sec, les hommes, femmes ou enfants qui semblent sortir de nulle part dans ces grands espaces !
         Pour les arrêts-dodo pas de problèmes, toujours à l’orée d’un village, toujours tranquilles mais il faut plusieurs duvets car il y a de la glace sur les vitres même à l’intérieur de la voiture… C’est pourtant magnifique de se réveiller ainsi dans la nature et de n’avoir que quelques mètres à faire pour boire un thé chaud et manger le merveilleux pain afghan (souvent accompagné de quelques brochettes d’agneau) !
          Puis Mazar-i-Sharif…

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Mazar-i-Sharif

        Petite ville sur un grand plateau.

        Si les montagnes environnantes peuvent être hautes, ce plateau n'est qu’à 380m d’altitude.

        Mazar-i-Sharif signifie “tombeau du saint” car, dit la légende, la sépulture d’Ali, gendre du prophète, y aurait été retrouvée ; la mosquée a d’ailleurs été construite sur cet emplacement supposé.
        La très belle mosquée, toute bleue, était en travaux de restauration, j’ai donc fait peu de photos. Quand à l’esplanade et ses pigeons, je ne les ai vus que sur des photos récentes (mais peut-être n’y en avait-il pas à ce moment-là parce que nous étions en hiver et en 1973).
        Il ne doit pas y avoir beaucoup d’autres villes où un passant tenant à la main quelques branches de cannabis tout frais vous en offre une, comme ça, juste avec un sourire… J’ai remercié d’un sourire aussi.
         C’est dans les environs que nous avons assisté à un bouzkachi.

        De là aussi nous avons voulu prendre une route « juste pour faire un tour ». Une route dans un paysage hors du temps. Le chemin suivait en partie le lit d’une rivière et, entre deux montagnes, un porche en pierres puis la piste continuait dans une gorge. On pouvait bien imaginer ce qu’étaient les déplacements quelques siècles avant, quand il y avait des portes que l’on fermait le soir. (si l’on se plait à nous rebattre les oreilles avec l’insécurité actuelle, autrefois il y avait les brigands de grands chemins –et de grandes pistes….). Ce parcours a été pour nous un des plus beaux. Nous y avons rencontré une petite caravane de dromadaires, un groupe d’hommes avec leurs ânes… Et nous avons fait comme l’ânier, nous avons bu l’eau de la rivière (qui ne nous a pas rendu malades…). Mais à un moment donné, nous avons dû faire demi-tour car, même si l’AMI6 peut jouer un peu les tracteurs, il y a des pistes qu’elle ne pouvait pas franchir !
        Son inconvénient d’être une petite voiture était parfois un avantage. Sur une autre route dans la région, elle patinait terriblement dans une côte comme ensablée, il a suffit que je descende laissant mon ami au volant) et, aidée par un homme qui passait par là, que nous la poussions sur quelques mètres pour qu’elle reparte normalement (enfin, à son rythme…..)

Mazar-i-Sharif et sa mosquée bleue vus par un voyageur :
https://www.i-voyages.net/mazar-e-sharif/

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Bouzkachi

        Nous avons eu la chance d'assister à un bouzkachi dans les environs de Mazar-i-Sharif (dans le nord du pays).
        C'était en novembre et le temps était particulièrement beau et frais, le ciel limpide. C'est en prenant un thé dans une tchaïkhana que nous avons appris que le lendemain il y aurait un bouzkachi dans l'après-midi et un combat de chiens le matin ! Pour le combat de chiens, ça a été « non » !!!!! Je ne crois pas que j'aurais supporté ça même si c'est toujours intéressant de voir les particularités d'un pays ! Mais pour le bouzkachi, ça a été « oui » !

        Ce qui est maintenant un sport, le sport national, servait jadis à s'emparer des troupeaux de l'ennemi... Actuellement, c'est le cadavre d'une chèvre qui fait tout l'enjeu, la gloire et l'honneur de gagner un tournoi (le sens de “bouzkachi” est “attrape chèvre” en persan…)
       La partie s'est déroulée sur une une plaine entourée de montagnes très découpées, formant comme un vaste cirque naturel, magnifique steppe ; l'herbe séchée, les flancs de montagnes nus. Les Afghans avec leur belle allure, turbans ou toques, veste ou manteau matelassé rayé ou brun, bottes à talon. Les chevaux !
        C'était un grand rassemblement d'hommes et de chevaux. Je ne sais pas combien il y avait de joueurs mais ils étaient très nombreux. Par moment on aurait pu se croire sur le tournage d'un film d'aventure !
        Nous nous sommes installés sur un flanc de montagne, comme tout le monde en attendant le début du jeu. Le spectacle était de partout ! Une chèvre a été tuée, décapitée ; les extrémités de ses pattes ont été coupées et, je n’ai pas su pourquoi, posées devant moi… J’ai dit merci.

        La partie nous a parue confuse mais nous n'en connaissions pas les règles... Ce qui est sûr, c'est que les cavaliers (tchopendoz) doivent apporter en un point donné le cadavre de la chèvre. Le seul fait de la ramasser est déjà un exploit ! Il y a des mêlées, des courses, des bousculades, de la poussière. Il doit bien avoir aussi quelques coups de cravache qui se perdent sur des cavaliers ! On se demandait aussi comment ils arrivaient à tenir la chèvre d'une main, calée contre leur jambe et diriger le cheval de l'autre ; il y avait diverses manières de la tenir (on peut l'apercevoir sur certaines photos).
         Pour prendre des photos, nous essayions de nous approcher le plus possible mais en ce qui me concerne, j'en faisais surtout quand il y avait beaucoup de bruit et de poussière ! Parfois, la partie se ralentissait, comme s'il y avait presque une pause. Les chevaux étaient de couleurs diverses : bruns, dorés, blancs.
          Ce sport fait penser à du rugby à cheval !

          Et bien sûr, une pensée pour « les cavaliers » de Joseph Kessel.

Ici sont présentés la règle du jeu, l’élevage des chevaux à bouzkachi :
http://mag.monchval.com/le-buzkashi/

INA : Un reportage de A2, de 1997. Il date un peu mais montre un aspect de l'Afghanistan et entre autre de Mazar-i-Sharif et sa région :
http://www.ina.fr/video/CPC77053468

de magnifiques photos de bouzkachi (photographies prises au Tadjikistan mais le bouzkachi se pratique dans une grande partie de l'Asie Centrale)..
http://www.photosdumonde.com/pdm/index.php?lang=fr&catalogue=1&subject_id=111&photos_nb_thumb=0&subject_nb_thumb=0